Dans les districts du nord de Zanzibar, des plantes médicinales (phytothérapie) sont souvent utilisées pour traiter certaines maladies et se protéger des mauvais esprits. Bien que courant, l’usage de ces types de remèdes peut s’avérer dangereux, voire potentiellement mortel dans le cas de femmes enceintes.  

Ramla sait qu’à l’abri des regards, dans son village de Gamba, à Zanzibar, de nombreuses personnes recourent à des plantes médicinales comme le mpopoo ou le mlakunguru (noms de plantes locales, comme des feuilles et des racines) pour traiter les symptômes de maladies, plutôt que de se rendre dans un établissement de santé. Les femmes enceintes recourent elles aussi à ces plantes médicinales pour protéger leur grossesse, mais cette utilisation entraîne fréquemment des problèmes tels que des effets secondaires dangereux pour la mère, des malformations congénitales chez le bébé, voire des fausses couches. Une réalité que Ramla veut changer en aidant les femmes de son village à accoucher de bébés en bonne santé. Elle est volontaire en santé communautaire (Community Health Volunteer - CHV) pour Jamii ni Afya, un programme de santé communautaire numérique dirigé par le ministère de la Santé de Zanzibar et soutenu par D-tree International. 

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Une sage-femme communautaire affiche les herbes qu'elle utilise pour soigner ses patients
(© Kevin Ferguson)

Dans le cadre de son travail comme CHV, Ramla se rend régulièrement au domicile des femmes enceintes pour dépister les signes de danger et les facteurs de risque qui pourraient indiquer la présence d’un problème de santé urgent devant être traité dans un établissement de santé. Elle sensibilise également les femmes enceintes et les personnes s’occupant d’enfants de moins de cinq ans aux informations sanitaires essentielles, telles que l’importance d’accoucher dans un établissement de santé, une bonne alimentation pendant la grossesse et pour les enfants en pleine croissance, et les étapes du développement de l’enfant. Pour Ramla, cependant, l’un des sujets les plus importants à aborder lorsqu’elle dispense ses enseignements dans son village concerne les dangers liés à l’utilisation de plantes médicinales. Alors que cette pratique était auparavant réservée aux ménages, le programme de santé communautaire a permis à des CHV comme Ramla de rencontrer les personnes chez elles et de les prévenir des dangers inhérents à ces remèdes.  

Avec le soutien du programme Wehubit d’Enabel, D-tree International utilise l’apprentissage machine pour aider les CHV comme Ramla à en faire plus encore. Des techniques d’apprentissage machine, mises en œuvre par D-tree International, ont été utilisées pour créer un modèle prédictif des risques pour les femmes enceintes ; pour les femmes enceintes identifiées comme présentant un risque plus élevé de décès périnatal, l’application leur propose ensuite des parcours de soins supplémentaires et des services différenciés. 

Cela signifie pour Ramla que chaque visite de ménage qu’elle effectue sera différente. Elle sait que chacune de ses clientes enceintes a des circonstances et des besoins uniques, et elle est en mesure à présent de les aider à y répondre. Lorsqu’elle enregistre une nouvelle femme enceinte, par exemple, Ramla reçoit désormais un feedback en temps réel sur son application mobile au fur et à mesure qu’elle recueille des informations auprès de la femme. Des facteurs tels que l’âge, la situation de vie et les antécédents obstétriques peuvent tous être de puissants prédicteurs des risques de grossesse ; aussi, comme l’application recueille ces informations sur les antécédents médicaux, elle prend également en compte l’utilisation de plantes médicinales par la femme. Si le système identifie une femme comme présentant un risque élevé de complications lors de la grossesse, l’application Jamii ni Afya peut alors indiquer à Ramla les prochaines étapes à suivre pour mettre la femme en contact avec les soins adaptés dont elle a besoin. 

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Un bénévole de santé communautaire s'occupe d'une mère
de jeunes enfants lors d'une visite à domicile à Zanzibar (© Mark Leong)

Ramla sait que le défi qui reste à relever dans son village, c’est de sensibiliser la population aux dangers liés aux plantes médicinales. C’est précisément à ce que niveau que son rôle de CHV est si essentiel dans le programme Jamii ni Afya. Toutefois, grâce à la technologie d’apprentissage machine, Ramla est désormais en mesure d’identifier les grossesses à haut risque et d’intervenir avant que les effets les plus désastreux ne se produisent.